Orange confirme que des discussions sont en cours en vue d’une fusion de ses activités espagnoles avec celle de Masmovil. Les négociations visent à la création d’une joint venture à parts égales mieux armée pour un marché extrêmement concurrentiel.

L’opération mènerait à la création d’une entreprise valorisée à 19,2 milliards d’euros, appuyée sur 20 millions d’abonnés au mobile, 7 millions d’abonnés au téléphone fixe et presque 1,5 million d’abonnés aux services de télévision.

Dans un communiqué, Orange affirme que la nouvelle entité générerait un chiffre d’affaires de plus de 7,5 milliards d’euros ainsi que des gains de synergie annuels supérieurs à 450 millions d’euros trois ans après le bouclage de la transaction.

L’accord en cours de discussion inclut par ailleurs le droit pour chacune des parties de se lancer sur les marchés. Orange prend en outre une option de prise de contrôle et ainsi consolider l’entité combinée en cas d’introduction en bourse.

La fusion serait la dernière grande transaction portée au crédit de Stéphane Richard avant son départ prochain. « La création de cette joint venture avec Masmovil est une très bonne nouvelle, commente le pdg d’Orange. Notre projet d’accord s’appuie sur une coopération fructueuse déjà existante, visant à créer un acteur plus important disposant des ressources nécessaires pour réaliser les investissements requis au développement du marché espagnol. »

Masmovil est la propriété du groupe Lorca JVCO, suite à la prise de contrôle de l’opérateur par Cinven, KKR et Providence fin 2020.

Orange et Lorca JVCO espèrent signer un accord au 2e trimestre et boucler la transaction au 2e trimestre 2023, moyennant approbation des autorités de régulation, tant espagnoles qu’européennes. De fait, obtenir le feu vert de la Commission Européenne sera le principal défi pour les deux partenaires.

Cas unique ou précurseur ?

Pour Kester Mann, analyste au cabinet CCS Insight, ce rapprochement est « le premier test majeur de l’appétit des régulateurs pour la consolidation des marchés nationaux depuis la pandémie » et pourrait « ouvrir les vannes à un torrent d’alliances similaires en Italie, au Portugal et aux Royaume-Uni » en cas d’approbation.

Kester Mann considère que la fusion entre Orange Espagne et Masmovil « peut être considérée comme un coup porté à l’investisseur activiste Cevian Capital », qui poussait Vodafone à épouser des concurrents dans plusieurs pays.

Le pdg de Vodafone, Nick Read, a lui-même reconnu qu’il avait entrepris des manœuvres proactives en vue de possibles consolidations, quoique son groupe ait récemment rejeté les avances d’Iliad en Italie.

La fusion espagnole devrait cependant être considérée comme un progrès par toutes les parties prenantes, les directions d’Orange et de Vodafone n’ayant cessé en particulier de déplorer la concurrence locale acharnée qui les a forcées à restructurer avec force licenciements dans l’espoir de retrouver la rentabilité. Le groupe français a par ailleurs consenti en juillet 2021 une énorme dépréciation de sa filiale espagnole, là encore une conséquence de la guerre des prix outre-Pyrénées.